Années 1967-1972
The Who, festival de l’Ile de Wright 1970. © https://grandenapoli.it
Les années 1965-1970 voient émerger une floraison de tendances empruntant aussi bien au blues, au rock’n roll, à la musique folk britannique ou d’autres horizons, au classique (de la notion d’«album concept» à la structure orchestrale d'un titre), pour faire émerger des formules, nonobstant le déni même des artistes et la relative pertinence sociologique voir musicologique, telles que: Blues, Rock, Folk, Hard Rock, Heavy Metal, Glam-Rock, Rock progressif-Art Rock, Punk…
Entamée notamment sous les ciels et paysages tout en volutes de la génération hippie (festivals de l’Ile de Wright, Woodstock), la période s’achève sur les coups de poings rythmiques dans le mur de briques noircies des années thatchériennes. Si le punk semble marquer un retour à l’énergie brute, l’instrumentation minimale, des débuts de l’ère du rockn’roll, l’évolution musicale est néanmoins soutenue par une infrastructure technique (instrumentation, sonorisation, enregistrement…) qui se déploie et s’affine, ainsi que par le «rapport ambigu» des artistes à la logique économique des «Majors» de la production, tels que l’exprimeront † John Lennon (Beatles) ou Johnny Rotten (Sex Pistols). Époque bénie de l’industrie phonographique, soutenue par le plein régime de l’industrie des médias.
• Sergent Pepper’s Lonely Heart Club Band (1967)
> Beatles (The)
— Référence: Sergent Pepper’s Lonely Heart Club Band; EMI
La célébrissime pochette de l’album Sergent Pepper’s, où les Beatles ont convoqué de multiples personnalités historiques. © Jann Haworth and Peter Blake/EMI
Considéré comme le «sommet» de la carrière des quatre garçons de Liverpool et comme un opus qui révolutionne l’univers de la pop, à la fois sur le plan musical (il annonce les futurs albums concept et les opéras-rock) et du packaging (design de la pochette). La preuve par l’audience: 32 millions de copies écoulées (Monde). On y perçoit clairement la mutation d’un rock et d’un folk simples vers une conception plus ouverte soutenue par une orchestration d’avenir.
J’apprécie particulièrement l’enchainement des titres Sergent Pepper’s/With a Little help From my Friends/Lucy in the Sky with Diamonds, l’articulation de différents répertoires (fanfare, rock, blues, chanson), l’inventivité mélodique, une ambiance chaleureuse, printanière. Cela me renvoie à une semaine Beatles que je prévoyais d’aller apprécier à la Philharmonie de Paris (annulée pour cause de Covid, hélas). Souvenir aussi d’une belle exposition à la Maison de la radio à Paris (2017). Un disque iconique.
Parce qu’on verra, plus loin, ce que le plus talentueux (à mon sens) des Fab Four a continué à produire, j’ajoute le seul titre de † John Lennon «solo» que j’ai souvent écouté. Il évoque un séduisant anarchisme adolescent, traduit dans une judicieuse trame textuelle: je veux parler, bien sûr, de Imagine (album au titre éponyme, 1971). Et parce que nous l’avons beaucoup écouté aussi, je veux citer la reprise de With a Little Help par † Joe Cocker, en transe sur la scène du festival culte de Woodstock (1969).
† John Lennon (guitares acoustique et électrique, orgue, piano, percussions, chant, effets sonores); Paul McCartney (guitare basse, guitares acoustiques et électrique, piano, orgue, percussions, chant, effets sonores); † George Harrison (guitares acoustique et électrique, sitar, tamboura, harmonica, percussions, chant); Ringo Starr (batterie, percussions, piano, harmonica, chant)
Source: Sergent Pepper’s Lonely Heart Club Band (https://fr.wikipedia.org/wiki/Sgt._Pepper%27s_Lonely_Hearts_Club_Band_(album)
Titres Playlist: With a Little Help from my Friends, Lucy in the Sky with Diamonds + Imagine + With a Little Help from my Friends (Joe Cocker)
• Lemmings by Bachdenkel (1970-1973)
> Bachdenkel
— Référence: Lemmings, Bachdenkel; Philipps
L’album de Bachdenkel fut enregistré en France et eut un modeste succès. Il marque néanmoins une étape vers le rock progressif. © Philipps
Souvenir très personnel d’une grande et belle maison où nous retrouvions, adolescents, pour écouter de la musique; c’est là que je découvre ce disque curieux et méconnu que [l’ami Jean-Marc-Grand Bob], notre hôte, ne connaissait pourtant pas. Il émane d’un quatuor originaire de Birmingham, mais qui produira le disque en France, non sans quelque difficulté. L’atmosphère est au psychédélisme empreint de brume et de pluie et se révèle assez proche, quoique moins apre, de la ligne du Van der Graff Generator et de Peter Hammill.
La référence au «gothique», si prégnante dans l’imaginaire culturel britannique, s’expose particulièrement dans le final. Demeure l’impression d’une longue journée, pluvieuse, de novembre, quand la tristesse finit par vous tenir chaud. A mon sens, il faut l’écouter l’album en intégralité. Son audience a visiblement été très confidentielle.
Peter Kimberley (guitare basse, piano, voix); † Colin Swinburne (guitare, orgue, piano, voix); Brian Smith (batterie); Karel Beer (orgue)
Source: Lemmings, Bachdenkel album (https://en.wikipedia.org/wiki/Lemmings_(Bachdenkel_album)
Titres Playlist: Long Time Living, An Appointment with the Master
• Tea for the Tillerman (1970)
> Cat Stevens
— Référence: Tea for the Tillerman; Island Records, A&M Records
Cat Stevens a dessiné lui-même l’image de la pochette de son album le plus connu. L’atmosphère est au folk doux-amer, mélodieux, raffiné. © Island Records
Juste une incursion dans la production de Cat Stevens (de son vrai nom Steven Demetre Georgiou) et ses compositions folk douce-amères, en aquarelles, qui se fit oublier de nous aussi lorsqu’il se convertit à l’Islam (mais après tout, dans cette période où la spiritualité préoccupait beaucoup les artistes de la musique pop…).
Je crois que c’est l’ami Gérard/Grand Fun qui me le fit découvrir et me dirigea inévitablement vers les titres Father and Son et Wild World ainsi que Lady Darbanville (sur l’album Mona Bone Jakon, 1970). Je me rends compte, en écrivant ces quelques lignes, que ces deux derniers morceaux se répondent (rupture, déclaration d’amour), et qu’ils font écho au plus ancien First Cut is the Deepest (1967), dont je connaissais, par ailleurs, la réinterprétation élogieuse, plus blues, par Rod Stewart (sur l’album A Night on the Town, 1976). Et que malgré notre oubli, CS a rencontré un très grand succès auprès du public, avec des dizaines de millions d’albums vendus entre 1967 et 1978.
Cat Stevens (chant, guitares, claviers); Alun Davies (guitar, chœurs); John Ryan (contrebasse); Harvey Burns (batterie, congas, tambourin); Jack Rostein (violon); Del Newman (arrangements)
Source: Cat Stevens (https://fr.wikipedia.org/wiki/Cat_Stevens); Tea for the Tillerman (https://fr.wikipedia.org/wiki/Tea_for_the_Tillerman)
Titres Playlist: Father and Son, Wild World, Lady d’Arbanville
• Aqualung (1971)
> Jethro Tull
Référence: Aqualung; Chrysalis/Island
La pochette d’Aqualung, dessinée par Burton Silverman, évoque à la fois le titre phare de l’album et l’allure du leader Ian Anderson, spécialiste en textes très critiques et flute surexcitée. © Chrysalis/Island
L’album de référence du groupe Jethro Tull, originaire de Blackpool, dans sa formation la plus aboutie inclus le prodigieux Ian Anderson, pour son allure (à laquelle fait penser le clochard sur la pochette du disque), sa présence scénique, son registre de voix très rock (rauque) conjugué avec un art certain de la flute. Le titre du même nom est représentatif d’une évolution de la culture rock d’origine du groupe vers un mix progressif (Hard-Rock, Folk, réminiscences classiques). Le LP s’est vendu à plus de 3,5 millions d’exemplaires (certifiés) en zone anglo-saxonne (USA, RU) et Allemagne. Son architecture tordue, aux ramifications pas toujours claires, me laisse néanmoins sur ma faim.
Ian Anderson (chant, guitare acoustique, flûte traversière, production); Martin Barre (guitare électrique, flûte à bec soprano); Jeffrey Hammond-Hammond (basse, chœur, flûte à bec alto); John Evan (piano, orgue, mellotron); Clive Bunker (batterie, percussions)
Source: Aqualung (https://fr.wikipedia.org/wiki/Aqualung_(album)
Titres Playlist: Aqualung, Locomotive Breath
• Fool’s Mate (1971)
> Peter Hammill
Référence: Fools Mate; Charisma, Virgin, Fie
Le premier album solo du charismatique leader du Van Der Graaf Generator., dont la pochette n’est pas sans évoquer le maleux et inquiétant échiquier du conte Alice de Lewis Caroll ainsi que le Tarot divinatoire. De l’Art rock sombre, porté par une voix apre ou voilée. © Paul Whitehead/Charisma
Le premier album solo du chanteur, guitariste et compositeur du groupe de Manchester Van Der Graaf Generator, alors en train de monter en puissance. Voilà pourquoi, et j’espère que quelques amis ne m’en voudront pas, je confonds volontiers les deux en Peter Hammill. Si l’on considère que le VDGG était un groupe de tendance progressive, notamment de par ses longues plages musicales, il faut préciser qu’il cultive un lyrisme noir (oxymore ?), ponctué de fréquentes lignes de rupture, d’énervements très rock, que sous-tend une voix âpre ou voilée, désabusée. Exemples: Imperial Zeppelin, Candle, Solitude. Il ne semble pas que l’audience nationale et internationale de l’album ait été très importante.
J’aurais certes pu choisir Over, longue complainte d’automne qui me ramène à un de ces moments surprenants que la survenue de «hippies» ou «babacool» dans notre bourgade du fin fond de la France, à la fin des années 1970, pouvait produire. Nous avons passé quelques soirées à écouter ce disque, comme pris dans un enchantement [n’est-ce pas cher Philippe/Le Mage?]. Et pour ne pas être trop «ingrat» avec le VDGG, je souligne l’intérêt de leur dernier album avant première séparation, Pawn Hearts (1972).
Peter Hammill (chant, chœurs, guitare acoustique, piano); Hugh Banton (piano, orgue, chœurs); Rod Clements (basse, violon); Nic Potter (basse); Ray Jackson (harpe, mandoline, chœurs), David Jackson (saxophone ténor, alto, flûte, chœurs); Robert Fripp (guitare); Guy Evans (batterie, percussions); Martin Pottinger (batterie); Paul Whitehead (percussions).
Source: Peter Hammill (https://fr.wikipedia.org/wiki/Peter_Hammill); Fool’s Mate (https://fr.wikipedia.org/wiki/Fool%27s_Mate)
Titres Playlist: Imperial Zeppelin, Solitude + This Side of the Looking Glass
• Made in Japan (1972)
>Deep Purple
Made in Japan; EMI, Warner Bross
Un grand disque de concert malgré les longueurs exigées pour la mise en valeur de chaque musicien. Un portique du temple du Hard-Rock. © EMI, Warner Bross
Difficile d’oublier cet album ou l’énergie l’emporte sans nuire aux clartés de l’enregistrement studio et, pour moi, délivre d’une certaine lourdeur propre à Deep Purple (claviers redoutables mais pompeux, par exemple; longues séquences où la virtuosité, bien réelle, semble plus importante que la composition, en l’occurrence, l’interminable The Mule). C’est le «disque de concert», avec entre autres l’effet de suspens de l’accordage de guitare, le riff «culte» sur Smoke on the Water. Il est vrai que ce morceau évoque de belles amitiés, [comment ne pas, en particulier, entrevoir l’expression de plaisir sur le visage de l’inoubliable et regretté † René ?]. C’est le morceau du quatuor du Hertfordshire qui me semble avoir le moins vieilli.
Fruit d’une suite de concerts à Osaka et Tokyo, ce portique du temple du Hard-Rock regroupe essentiellement des titres de In rock (1970) et Machine Head (1971). À écouter également: Child in Time, Lazy. L’album a connu un certain succès en France (100 000 exemplaires certifiés), pour un total de près de 2 millions de ventes certifiées, principalement aux USA, RU, en RFA.
Ritchie Blackmore (guitare électrique); Ian Gillan (chant, congas); Roger Glover (basse); † John Lord (claviers); Ian Paice (batterie, percussion)
Source: Made in Japan (https://fr.wikipedia.org/wiki/Made_in_Japan_(album_de_Deep_Purple)
Titres Playlist: Imperial Zeppelin, Solitude + This Side of the Looking Glass
• Greatest Hits (1970-2002)/Elton John
>Elton John
Greatest Hits 1970-2002; Universal Music (2022)
Elton John, une icônes de la pop britannique, brillant pianiste et mélodiste, compositeur prolixe et touche à tous les registres. © UTV
Pour tout dire, je ne me suis intéressé au cas Elton John qu’épisodiquement. Je n’ai jamais été sensible à ses excentricités vestimentaires, scéniques, peut-être parce que je ne suis pas britannique. Des bribes d’écoute me reviennent en mémoire, de titres que je retrouve dans cette compilation: Rocket Man (1972); Sorry Seems to be the Hardest Word et Don’t go breaking my Heart (1976). Je n’oublie pas, non plus, sa prestation éposutouflante dans le film Tommy des Who de 1975 (Pinball Wizard).
Il eut été injuste de ne pas lister ici Sir Elton Hercules John alias Reginald Kenneth Dwight, probablement l’une des icônes de la pop britannique, brillant pianiste et mélodiste, compositeur prolixe et touche à tous les registres, sachant aussi bien susciter l’allégresse que la tristesse, l’excès que l’intime. Tout le monde sait qu’il composa «l’hymne» en mémoire de Lady Di… Mais «la chandelle dans le vent», originellement, évoquait Marylin Monroe. La compilation a battu des records d’audience (près de 10 millions d’exemplaires certifiés).
Elton John (clavier, chant) + Divers
Elton John, Britannica-Stephen Holden (https://www.britannica.com/biography/Elton-John); (https://fr.wikipedia.org/wiki/Elton_John)
Titres Playlist: Rocket Man, Sorry seems to be the Hardest Word