Années 1975-1976 (*)
Brand X, ou la preuve que le jazz fusion n’est pas un domaine réservé des USA. © Charisma
• Livestock (1975)
Brand X
Livestock; Charisma
Découverte de ce disque via un ami [qui se reconnaîtra si je parle du «Cousin»]. Je n’imaginais pas que je trouverais là Phil Collins à la batterie, pour mon plus grand plaisir. S’il y eut une incursion réussie, hors le territoire quasi-souverain américain, dans le jazz fusion/jazz rock, c’est bien celle de ce quatuor londonien. Tout le disque, qui agrège diverses séquences de concerts à Londres, a quelque chose à la fois de chatoyant et de réservé, d’une très grande fluidité, sans exposition maniériste de la maîtrise instrumentale de l’un ou de l’autre.
John Goodsall (guitare); Robin Lumley (claviers); Percy Jones (basse); Phil Collins (batterie)
Livestock (https://en.wikipedia.org/wiki/Livestock_(Brand_X_album)
Titres Playlist: Nightmare, Ish
• EC was Here (1975)
> Eric Clapton
- Référence: EC Was Here; RSO
L’album où Eric Clapton, musicien originaire du Surrey, donne toute la mesure de son art du blues (structure, phrasé, vibrato, soli, chant). Ficelé à partir d’extraits de concerts aux États-Unis et en Grande-Bretagne, il couple des reprises de titres historiques (Rambling on My Mind; Further On Up the Road, Have you ever loved a Woman) et des compositions originales (Presence of the Lord; Can't find My Way Home). Il a connu un succès restreint (100 000 ex vendus au RU).
Si Clapton s’impose, dès les années 1960, au sein des Yardbirds, puis de Cream, Derek and the Dominos, comme un guitar heroe, j’ai le plus souvent du mal à accrocher, question de sécheresse du propos. C’est à cette sécheresse que me renvoie le calamiteux concert donné au Palais des sports de Toulouse en 1983, expédié en à peine plus d’une heure, où le glorieux Eric se montra surtout préoccupé de fumer sa cigarette, laissant ses accompagnateurs à l’œuvre… [Je ne fus pas seul à avoir quelque puce devant cette parodie de concert]. On connait le titre culte C
Eric Clapton (guitare, chant), Yvonne Elliman (chant), George Terry (guitare), Dick Slims (orgue), Carl Radle (basse), Jamie Oldaker (batterie), Marcy Levy (tambourin)
Source: EC Was here (https://fr.wikipedia.org/wiki/E.C._Was_Here); Eric Clapton, encyclopédie Britrannica, Adam Augustyn.
Titres Playlist: Have your ever loved a Woman, Presence of the Lord
Le Rocky Horror Picture Show, une comédie musicale unique inspirée par tous les genres pop de la période, surtout le Glam-Rock, parodiant les séries B de cinéma, les récits fantatisques Frankenstein et Dracula. © Fox-Ode
• The Rocky Horror Picture Show (1975)
> Divers (comédie musicale)
- Référence: The Rocky Horror Picture Show; BO du film (Jim Sharman); Century Fox-Ode (musique)
Une étonnante comédie musicale (= album-concept) a dominante Glam-Rock (surtout caractéristique par la tenue vestimentaire flamboyante voire extravagante des artistes; une musique emphatique/parodique qui se sous-tend plus ou moins, selon les groupes, par un phrasé pop, rock, hard rock, progressif) bande-son d’un film réalisé aux États-Unis, mais issu d’une pièce de théâtre créée à Londres (1973) par l’acteur et réalisateur britannique Richard’O’Brien.
Sa découverte, assez tardive (1987 ou 88) lors d’un festival de cinéma proposé par l’association Arts&Loisirs (salut à Jean-Luc; Manick; Patricia; Jean-Marc; in memoriam † René; † René…) me procura une heureuse surprise. Je venais de voir quelque chose de vraiment délirant que j’ose, aujourd’hui, mettre en relation avec une joyeuse bouffonnerie shakespearienne, ou encore avec l’Opéra de Quat’Sous de Kurt Weill, revus au temps de la «performance» wharolienne, sans oublier un humour noir typique qu’illustrent, à la même époque, les Monthy Python.
Sa particularité est que le public (au théâtre, comme dans la salle de cinéma) est invité à commenter l’histoire et à entrer dans la séance par un jet de grains de riz célébrant la demande en mariage de Brad (joué et chanté ici par Barry Bostwick) et Janet (Suzan Sarandon). Le rockeur américain † Meat Loaf y tient le rôle d’un mauvais garçon qui finit dévoré par les convives d’une fête de vampires obéissant à un certain Frank-N-Furter (Tim Curry, que l’on retrouve aussi dans la saga de la Famille Adams). Notre descendant de Frankenstein et de Dracula rêve aussi de créer un homme… mais pour son usage sexuel propre. Il ignore cependant que son destin est scellé par une réincarnation de Mephistophélès, c’est-à-dire aussi le metteur en scène, auteur du texte et compositeur de la musique (le domestique Riff Raff).
Les fans adulent particulièrement le Time Warp (distorsion du temps) sur un tempo rock’n’roll à peine tempéré de chœur gospel, tandis que l’ouverture (Science Fiction/Double Feature) et la scène où Frank s’avoue vaincu (I’m Going Home) ont des accents très Bowie, VDGG… moqués par les violons.
Count Ian Blair, Mick Grabham (guitares); Dave Wintour (basse); B.J. Wilson(batterie); Phil Kenzie (saxophone); John Bundrick (claviers); Martin Briley, Helen Chappelle, Brian Engel, Barry St. John, Liza Strike, Clare Torry (vocaux) + Richard O’Brien; Barry Bostwick; Susan Sarandon; Tim Curry; Patricia Quinn; Little Nell; Meat Loaf; Jonathan Adams…
Source: The Rocky Horor Picture Show, (https://fr.wikipedia.org/wiki/E.C._Was_Here); Eric Clapton, encyclopédie Britrannica, Adam Augustyn.
Titres Playlist: Time Warp, ’m Going Home
• Ommadawn (1975)
>Mike Oldfield
— Référence: Ommadawn; Virgin
Par son atmosphère bucolique, le disque Ommadawn n’en est que plus approprié au nom de son compositeur — traduisez Vieux champ, en français. © Virgin
Le romantisme de la campagne anglaise sur vinyle… Et une atmosphère bucolique tout à fait en phase avec le nom du compositeur: traduisez «vieux champ». C’est dans une retraite du Hertfordshire que Mike Oldfield compose cet album avec la participation de musiciens locaux d’inspiration celtique et médiévale et de musiciens de tradition africaine. Nous sommes quand même dans la mouvance du rock progressif versus très électronique, résonant avec l’approche de Brian Eno (en Grande-Bretagne) ou celles de Tangerine Dream et Klaus Schulze (en Allemagne), et telle qu’elle s’est déjà manifestée dans le très connu Tubular Bells (musique du célèbre film L’exorciste). Les instruments acoustiques (guitare, cornemuse, percussions, voix), apportent une belle chair, une texture élégiaque. Le succès, notamment auprès de la critique est au rendez-vous. Le LP s’écoulera néanmoins à plus de 100 000 exemplaires (certifiés) au Royaume-Uni.
S’il évoque volontiers l’influence du compositeur minimaliste américain Terry Riley, il me semble que Mike Olfield s’est inspiré aussi de Johan Pachlebel (le fameux Canon) pour la mélodie de Horseback, et, plus discrètement, de Stravinsky (L’oiseau de feu) pour la partie 2.
Mike Oldfield (guitares, harpe celtique, basse, banjo, synthétiseur, chant); Terry Oldfield (flûte de Pan); Sally Olfield (chant); Paddy Moloney (cornemuse); Leslie Penning (flûte à bec); The Hereford City Band (cuivres); Jabula (percussions)…
* Source: Livret du CD Ommadawn, Marc Powel; Ommadawn (https://fr.wikipedia.org/wiki/Ommadawn);
Titres Playlist: Ommadawn, part 2, inclus Horseback
A Trick of the Tail, premier album de Genesis sans Peter Gabriel, révèle Phlipp Collins au chant. Il met spécifiquement en musique des histoires inspirées par l’écrivain William Golding (1911-1993), sur le mode de la fable philosophique. La pochette illustre l’appétence du groupe pour l’univers du conte.© Charisma
• A Trick of the Tail (1975)
>Genesis
— Référence: A Trick of the Tail; Charisma
Il va de soi que Genesis aura été un incontournable de la mouvance Rock progressif, en laquelle, pour tout dire, les Britanniques me semblent bien plus prolixes que leurs cousins d’Outre-Atlantique. Il va de soi que, pour les aficionados, la période avec Peter Gabriel au chant, à la composition, à l’invention scénique, doit faire référence. À vrai dire, j’ai eu quelque mal à m’approprier la musique de ce groupe [malgré les conseils de quelques amis d’enfance et musiciens, qui devaient d’ailleurs s’en inspirer pour créer leur (notre) groupe, baptisé Onis, au premier rang desquels le regretté † Claude-Momo, mais aussi Salch, Benz, Olivier], avant de passer en revue tout ce qu’il avait produit jusqu’alors et de me dire, «s’il tourne en France, ne pas rater le rendez-vous». Je me revois donc en Avignon (1981) puis à Fréjus (1982) pour deux concerts de bonne facture même si, à ce moment-là, les derniers albums ne me procurent plus que l’impression qu’il faut que le groupe survive.
S’il existait une bonne compilation, je la conseillerais volontiers. Je n’y omettrai pas Selling England by the Pound… Mais faute de… Nous voilà avec A Trick of the Tail, premier album après le départ du charismatique Peter Gabriel, que Philipp Collins supplée sans démériter (plus tard, son omniprésence vocale m’agacera) et où figure encore le délicat Steve Hackett. J’en apprécie particulièrement les ambiances très bucoliques, aux contours doux et mélodieux (Entangled, Ripples, A Trick of the Tail, Mad Man Moon) mais pas mièvres que tissent Hackett et Banks (non sans penser à Bach).
Phil Collins (chant, chœurs, batterie, percussions); Tony Banks (claviers, guitare, chœurs); Steve Hackett (guitares); Mike Rutherford (basse, guitare, chœurs).
* Source: Genesis, encyclopédie Britannica (https://www.britannica.com/topic/Genesis-British-rock-group); A Trick of the Tail (https://fr.wikipedia.org/wiki/A_Trick_of_the_Tail)
Titres Playlist: Entangled, Dance on a Volcano + I Know what I Like (Selling England by The Pound)
• Shamal (1975)
>Gong
— Référence: Shamal; Virgin
Gong: un groupe franco-britannique épris d’expérimentation, mixant le psychédélisme et le jazz, avec quelque chose de déguingandé, bohème. © Virgin
Pour donner une impression de l’esprit Gong, peut-être pourrais-je évoquer l’ambiance très particulière d’un village nommé Festes-Saint-André (Aude), propice sans doute au retour à la terre (malgré l’ingratitude de son terroir) qu’appéciaient ceux que l’on surnomma ensuite les «babas cool». Le costume paysan, la traditionnelle fête votive, côté scène comme côté adjuvants de gaieté, s’en trouvèrent transfigurés, pour notre plus grand plaisir. Le nom du groupe (même s’il fut aménagé à plusieurs reprises) parle de lui-même: forte influence hippie, dans l’attitude et le costume comme dans les sinuosités d’Orient qui s’incrustent dans la trame musicale.
Il se trouve que Gong fédéra des musiciens britanniques (le guitariste † David Aellen ; le batteur et claviériste Robert Wyatt, puis le guitariste Steve Hillage) et français (entre autres, le flutiste et saxophoniste Didier Malherbe, le batteur † Pierre Moerlen, la choriste et claviériste Miquette Giraudy) épris d’expérimentation psychédélique, de «trip» coloré pop, folk et jazz fusion. Un état d’esprit caractéristique de ce que les musicologues de l’époque nommèrent «école de Canterbury», c’est-à-dire une scène anglaise sous influence jazz très marquée, pratiquant l’impro au point de faire concevoir les groupes de manière très informelle, tels Soft Machine, ou encore Caravan.
S’il marque une bascule dans la composition et les choix artistiques du groupe, l’album Shamal (produit par le batteur des Pink Floyd, Nick Mason) a quelque chose d’une virtuosité moqueuse, déguigandée, mais empreinte d’une certaine douceur/langueur acoustique.
† Pierre Moerlen (batterie, vibraphone, cloches tubulaires); Patrice Lemoine (pianos, orgue, Mini-Moog); Mike Howlett (chant, basse); Didier Malherbe (saxophones ténor & soprano, flûtes, flûtes de bambou, gongs); Mireille Bauer (marimba, glockenspiel, xylophone, percussions & gongs) + Steve Hillage (guitare), Miquette Giraudy (vocaux), Sandy Colley (chant), Jorge Pinchevsky (violon)
Source: Shamal (https://fr.wikipedia.org/wiki/Shamal); Gong (https://fr.wikipedia.org/wiki/Gong_(groupe)
Titres Playlist: Shamal
L’esprit baba de Gong imprègne le premier album solo de son ex-guitariste, lequel trouve à exposer une certaine virtuosité. © Virgin Records
• Fish Rising (1975)
> Steve Hillage
— Réference: Fish Rising; Virgin Records
Fish Rising sort quasiment en même temps que Shamal, et la tribu Gong y contribue, belle joueuse. Mais, ici, le tempo est donné par la guitare arborescente, dépliant de longues plages aux accents cristallins, témoin l’incontournable Solar Musick Suite, qui font heureusement oublier la voix un peu bêlante de Steve Hillage.
Steve Hillage (chant, guitare électrique solo); Miquette Giraudy (chœurs, claviers, synthétiseurs); Mike Howlett (basse); Dave Stewart (orgue, piano); Tim Blake (synthétiseurs, tampoura); Didier Malherbe (saxophone, flûte); Lindsay Cooper (basson); † Pierre Moerlen (batterie, marimba, darbouka)
* Source: Fish Rising (https://fr.wikipedia.org/wiki/Fish_Rising); Steve Hillage (https://fr.wikipedia.org/wiki/Steve_Hillage)
Titres Playlist: Solar Musick Suite
J'aurais pas remis la main tout seul sur ces pépites de BrandX dont je me souviens très bien.